Avantages sociaux transfrontaliers- notion d’enfant de travailleur
Cour de Justice, arrêt en date du 15 décembre 2016 dans les affaires jointes C-401/15 à C-403/15, Noémie Depesme contre Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche
La Cour de Justice de l’Union européenne a jugé que la notion d’enfant d’un travailleur frontalier pouvant bénéficier indirectement des avantages sociaux s’étend à l’enfant du conjoint ou du partenaire enregistré dudit travailleur au sens de l’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 2, du Règlement (UE) n° 492/2011 portant sur la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union.
Pour l’année académique 2013/2014, l’Etat luxembourgeois mit en place une bourse d’études supérieures à destination des enfants de travailleurs frontaliers exerçant leur activité professionnelle au Luxembourg.
Trois étudiants se sont vus respectivement refuser l’octroi de cette aide financière au motif que le travailleur transfrontalier en question, étant leur beau-père (conjoint de la mère), les trois étudiants n’étaient pas juridiquement les enfants d’un travailleur frontalier au sens de l’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 2, du Règlement (UE) n° 492/2011.
Les trois étudiants ayant contesté les décisions des autorités luxembourgeoises, la Cour administrative luxembourgeoise, saisie de l’affaire, décide de surseoir à statuer et de poser une question préjudicielle à la CJUE. Cette question porte essentiellement sur le fait de savoir si la notion d’« enfant » de travailleur frontalier, en matière d’avantage social, doit également inclure les beaux-enfants en prenant en compte la contribution à l’entretien de l’étudiant ou doit recouvrir uniquement la filiation directe. La CJUE commence par rappeler qu’en vertu de l’article 45 du TFUE et de l’article 7, paragraphe 2, du Règlement (UE) n° 492/2011, les travailleurs exerçant dans un autre Etat-membre (frontaliers) doivent bénéficier d’une égalité de traitement vis-à-vis des travailleurs nationaux, en ce compris les avantages sociaux. La Cour ajoute que cette égalité de traitement s’étend de manière indirecte aux membres de la famille du travailleur frontalier. La CJUE rappelle que la notion de « membres de la famille » au sens de l’article 2 c) de la Directive européenne 2004/38 comprend « les descendants directs âgés de moins de vingt et un ans ou à charge » mais également « les descendants directs du conjoint ou du partenaire ». Selon la CJUE, cette définition de « membre de la famille » doit également s’appliquer par analogie à la notion « d’enfant d’un travailleur frontalier » notamment lorsque le travailleur contribue à l’entretien des enfants de son conjoint ou du partenaire enregistré. Elle justifie sa position en expliquant que le champ d’application de la Directive 2004/38 et du Règlement 492/2011 est le même : « garantir le plein exercice des droits conférés aux citoyens de l’Union et aux membres de leur famille ».
La Cour a donc estimé que c’est à tort que les autorités luxembourgeoises ont refusé l’octroi des aides, en ajoutant que la qualité de « membre de la famille » relève d’une situation de fait et non de droit, qu’il appartient aux juridictions nationales d’apprécier sans qu’il soit nécessaire de mesurer l’étendue de la contribution du travailleur. Il en ressort, selon la CJUE, qu’au sens de l’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 2, du Règlement (UE) n° 492/2011, la notion d’enfant d’un travailleur frontalier, pouvant bénéficier indirectement des avantages sociaux, s’étend à l’enfant du conjoint ou du partenaire enregistré dudit travailleur.