Concurrence déloyale-logiciels pré installes-recours préjudiciel
Cour de cassation, Chambre civile 1, arrêt du 17 juin 2015
M. X. / Sony Europe Limited
Dans un arrêt du 17 juin 2015, la première chambre civile de la Cour de Cassation française a décidé de saisir la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) sur la conformité de l’offre conjointe consistant en la vente d’un ordinateur équipé de logiciels préinstallés avec la Directive 2005/29/sur les pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur.
En l’espèce, un particulier demandait à la société Sony, le remboursement de la partie du prix d’achat de son ordinateur correspondant au coût des logiciels préinstallés par la société.
Par un arrêt de la Cour d’Appel de Versailles de novembre 2013, le requérant a été débouté de sa demandé au motif que la vente de cet ordinateur ne constitue pas une pratique commerciale déloyale.
La CA se justifie en précisant que le requérant aurait pu s’adresser à un autre fabricant ou acheter un ordinateur d’une autre marque.
De plus, selon les juges, en proposant des ordinateurs avec des logiciels intégrés, l’entreprise SONY répondait à « une part de la demande de la clientèle préférant un produit préinstallé d’utilisation immédiate à une vente séparée ».
Le requérant a donc formé un pourvoi devant la Cour de Cassation contre l’arrêt de la CA ayant rejeté sa demande.
La Cour de Cassation revient tout d’abord sur la définition de pratique commerciale déloyale, à savoir une pratique « contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service ». Puis, elle rappelle que ces pratiques commerciales déloyales sont interdites en vertu de l’article L. 120-1 du code de la consommation.
La Cour mentionne également qu’il existe au niveau européen, une liste de pratiques commerciales déloyales en toutes circonstances en vertu de la Directive 2005/29 sur les pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur.
Or, selon la jurisprudence de la CJUE, ces pratiques pour être reconnues comme déloyales doivent faire l’objet d’une analyse au cas par cas (arrêt du 23 avril 2009 de la Cour de justice de l’Union européenne VTB-VAB, C-261/07 et C-299/07).
En conséquence, la Cour de Cassation a décidé d’envoyer à la CJUE trois questions sur la conformité de la vente conjointe d’un ordinateur équipé de logiciels installés avec les articles 5 (sur l’interdiction des pratiques commerciales déloyales, et l’article 7, relatif aux pratiques commerciales trompeuses caractérisées par une omission, et 7 de la Directive 2005/29). Les questions sont ainsi formulées :
1. Le fait de vendre conjointement un ordinateur équipé de logiciels préinstallés constitue-t-il une pratique commerciale déloyale au sens des articles 5 et 7 de la Directive 2005/29 même si le fabricant de l’ordinateur a fourni, par l’intermédiaire de son revendeur, des informations sur chacun des logiciels préinstallés sans préciser leur coût ?
2. Le fait de vendre conjointement un ordinateur équipé de logiciels préinstallés constitue-t-il une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5 de la Directive 2005/29 lorsque le client n’a pas d’autre choix que d’accepter ces logiciels ou de révoquer le contrat de vente ?
3. Le fait de vendre conjointement un ordinateur équipé de logiciels préinstallés constitue-t-il une pratique commerciale déloyale au sens de l’article 5 de la Directive 2005/29 lorsque le client ne peut obtenir du même fabricant un ordinateur nu de logiciels?
Dans l’attente de l’arrêt de la CJUE sur ces questions, l’audience a été renvoyée au 8 décembre 2015.